< Retour

L'accompagnement professionnel par un coach

Interviews -
1 novembre 2007


L'accompagnement professionnel par un coach

Monsieur Boujol, fondateur de l'entreprise Boujol Formation & Conseil et ancien président de la Société romande de Coaching, accompagne en sa qualité de coach des personnes dont les attentes sur le plan professionnel sont souvent diverses et variées. Pour bien comprendre l'enjeu de sa démarche, il nous a reçues afin de nous exposer les fondements de son approche personnelle.

 

Le statut du coach

Le coaching peut servir à deux choses : réussir un projet, atteindre un objectif, ou résoudre un problème. Cependant, le métier souffre encore d'un problème d'image, d'identité, dans le sens où les gens n'ont pas de références précises concernant le statut du coach. Cette activité se définit difficilement dans le sens où il n'existe pas de " méthode " prédéfinie de coaching, celle-ci se construisant en fonction de la personne à aider. Tout au plus le coach peut-il mettre en avant une pratique centrée sur la personne ou sur le groupe. Aussi parle-t-on d'approche et non pas de méthode en coaching.

Au sein de Boujol Formation & Conseil, M. Boujol présente deux types d'activité. Il intervient d'une part au sein de collectifs à l'intérieur des entreprises, très souvent auprès d'équipes de direction. Il est alors généralement en contact avec des responsables ou des chefs d'unité.

Parallèlement, il propose également des accompagnements individuels et travaille alors rarement pour les entreprises en direct, les demandes provenant généralement de particuliers. Il avoue d'ailleurs avoir une sorte de retenue déontologique s'agissant des mandats qui lui sont confiés par les entreprises, ne se sentant pas très à l'aise avec l'idée de devoir aider une personne à atteindre un objectif qui n'est peut-être pas le sien.

Quand je travaille en entreprise, ce qui est la minorité des cas s'agissant des accompagnements individuels, c'est généralement des situations dans lesquelles c'est la personne qui a demandé le coaching ou qui se l'est vu proposer. Mais elle a toujours plusieurs coaches et je suis une des personnes parmi celles qui sont à choix d'une part, d'autre part je n'ai pas de comptes à rendre à la direction, je n'ai de comptes à rendre qu'à la personne elle-même. Je ne me sentirais pas très à l'aise d'avoir à rendre des comptes aux personnes qui m'auraient mandaté comme coach. C'est une retenue que j'ai moi, que d'autres collègues n'ont pas et qui sont tout à fait à l'aise de faire ça ; personnellement je n'aime pas trop.

 

La pratique coach

Les demandes provenant des particuliers concernent essentiellement des questions liées à ce que M. Boujol qualifie de " situations de transition de carrière ", à savoir orientation ou réorientation de carrière, choix d'un métier, développement de sa carrière au sein d'une entreprise, changement de poste d'une entreprise à une autre, voire remise en cause de la quarantaine ou crise existentielle. Il peut s'agir également de personnes qui sont à la recherche d'un emploi ou désireuses de monter leur entreprise et qui sentent la nécessité d'être accompagnées dans leur cheminement.

L'essentiel de la pratique coach consiste en effet à accompagner la personne en l'amenant à s'interroger sur elle-même et à trouver ses propres solutions :

Moi je pars du principe que les solutions la personne les a, même si elle pense ne pas les avoir quand elle vient me voir. C'est l'attitude coach si vous voulez. Cela ne veut pas dire que je vais lui poser des questions jusqu'au bout, c'est-à-dire jusqu'au point où je vais lui faire deviner par exemple qu'il existe un site orientation.ch sur lequel elle va trouver des tas d'informations. Ce serait un petit peu ridicule de lui poser des questions et de lui dire : " à votre avis, où pourriez-vous trouver des ressources pour... ".  Non, à l'évidence je vais lui donner l'info. En revanche, je ne vais pas faire un travail d'analyse sur la base de ce que la personne me dit pour lui dire " vous pourriez ou devriez a fortiori faire ça ". C'est vraiment une démarche où j'aide la personne à faire ses propres choix, et je constate que c'est une chose que les gens en général apprécient.

La plupart du temps, il s'agit surtout d'être un interlocuteur pour la personne que l'on amène à prendre conscience de son propre fonctionnement, les questions du coach lui permettant de réaliser quelles sont les éventuelles erreurs qu'elle commet dans la façon dont elle travaille. Si la personne se présente avec un problème, le coach ne va pas s'intéresser au problème lui-même - ce qui équivaudrait à une démarche de conseil - mais l'interroger en vue de comprendre comment elle gère cette difficulté dans le sens où il s'agit pour elle de mobiliser ses propres ressources pour en venir à bout. Pour cela, le coach est à son écoute et il reformule ses propos afin de lui renvoyer une image de sa situation sur laquelle elle réfléchit ensuite par elle-même.

Le coaching c'est surtout une pratique en fait. En plus, il se situe à la frontière extrêmement ténue entre le conseil et la thérapie. Vous faites un pas d'un côté et vous tombez dans le conseil, et un pas de l'autre et vous tombez dans la thérapie. C'est très difficile de rester sur cette ligne stricte qui consiste à dire " je fais confiance à la personne, elle est autonome, elle a toutes les capacités, elle a toutes les compétences voulues ". Donc je ne l'assiste pas, elle n'est pas malade, je ne mets pas de pied dans la thérapie. Et puis, vu qu'elle a toutes les compétences, je ne vais pas non plus dans l'expertise. Donc je reste à cette frontière très ténue entre les deux.

Il s'agit par conséquent de définir très clairement quelles sont les attentes de la personne lorsqu'elle sollicite les services d'un coach. A lui de déterminer s'il peut répondre à la demande en adoptant une démarche de coaching plutôt que de conseil. M. Boujol relève en effet que les gens s'adressent très souvent à lui avec une demande de conseil, imaginant qu'il va les aider à résoudre leurs difficultés en leur fournissant des solutions toutes prêtes. S'il leur propose souvent de traiter leur demande d'une façon très orientée vers le coaching, encore faut-il s'accorder sur les modalités de cette approche :

Il faut se mettre d'accord sur ça avant autrement, en tant que personne désireuse d'aider l'autre, vous avez très vite tendance à donner du conseil. Et l'autre a aussi tendance à en demander, on a tellement l'habitude de fonctionner comme ça. Donc si on se met d'accord sur ce que c'est que le coaching, ce qui constitue la deuxième étape, dans la troisième étape on vérifie ensemble si le coaching est bien l'approche appropriée dans le contexte.

 

L'autonomie nécessaire du coaché

D'autre part, il s'agit pour le coach de déterminer si la personne est réellement autonome. En effet, dans un contexte professionnel où il est toujours davantage question de burn-out, il est primordial pour le coach de connaître ses limites et de savoir passer le flambeau lorsqu'il ne se sent plus apte à assumer l'accompagnement de la personne à son niveau. Il s'agit là d'un choix souvent personnel, les coaches étant différemment préparés à assumer divers types de situation. De son côté, M. Boujol argumente que c'est très souvent le degré de souffrance de la personne qui va déterminer de sa prise en charge par un thérapeute et non plus par lui :

A un moment donné, il y a un niveau de souffrance qui fait qu'on se dit " je ne me sens pas d'accompagner une personne qui souffre autant " parce que ça m'emmène, je peux plus garder la distance nécessaire, je n'y arrive pas, je ne vois pas en fait comment l'aider. Et ce qui va faire qu'on va nécessairement à un moment donné se dire " ok, là il faut s'arrêter et il vaut mieux passer à quelque chose d'autre ", c'est si cette souffrance est répétitive, elle revient. Et que la personne est dedans tout le temps, ou pratiquement tout le temps. Là, on a vraiment un signal qu'on est plus dans une relation de coaching, mais on rentre effectivement dans un accompagnement de type thérapeutique. Alors tout dépend du coach. Certains ont les compétences, les qualités, la formation pour faire ça. Moi je me suis formé personnellement en psychologie, non pas pour faire un accompagnement de type psychologique, mais justement pour savoir où était la limite. Et savoir quand donner, pour ne pas être piégé dans certaines situations. Donc tout dépend de ce qu'on va entendre justement par burn-out. Parce qu'il y a le burn-out où l'épuisement est tel que ce n'est pas juste en changeant une petite chose dans le travail ou même une grande chose qu'on va ressortir de l'épuisement, l'épuisement est physique. Là, on a certainement besoin d'une aide autre que simplement celle d'un coach. En revanche, je constate que dans beaucoup de situations où les gens sont vraiment super frustrés dans leur travail, très énervés, ça ne va pas du tout, dysfonctionnent comme on dit souvent dans le contexte professionnel, c'est souvent lié au fait que leurs motivations fondamentales ne sont pas respectées. Et là, effectivement, utiliser des outils psychométriques pour aider la personne à prendre conscience de ses motivations principales, c'est très utile. Et cette prise de conscience, chez quelqu'un qui n'est pas épuisé, qui n'est pas au niveau du burn-out, s'il y a l'énergie nécessaire, peut donner lieu à des redressements spectaculaires et à des changements radicaux d'attitude par cette prise de conscience. Alors là oui. Sur un plan comme celui-là, je pense que le coach est extrêmement utile. Mais voyez, pour être coach, fondamentalement il faut être convaincu que la personne en face de soi est autonome. C'est le critère. Dès lors que vous avez l'impression qu'elle ne l'est pas, alors soit cette personne a un besoin d'assistance par exemple en termes de compétences, puis vous allez effectivement lui donner ces compétences complémentaires ou l'aider à trouver les compétences dont elle a besoin pour être autonome, et alors peut-être que vous prenez une casquette de formateur ou d'expert, de conseiller ; ou alors elle manque d'autonomie au niveau du fait qu'elle a une sorte de dépendance vis-à-vis de vous comme on a une dépendance vis-à-vis d'un médecin, c'est une dépendance thérapeutique en fait. La personne n'a pas toute l'autonomie voulue et dans ce cas-là, on n'est pas à priori dans une relation de coaching.

Pour autant, il n'est pas toujours facile de rester dans une approche qui serait orientée " écoute-questionnement-feed back " et qui n'utiliserait à aucun moment ni la compétence de la personne, ni aucun outil. Si certains défendent ce type de coaching puriste, il s'agit en général pour le coach de savoir utiliser les bons outils au bon moment, et de le faire de façon totalement transparente par rapport à la personne.

 

La spécificité d'un accompagnement par le coaching

Au final, quelle est la spécificité du coaching par rapport à d'autres organismes spécialisés dans l'accompagnement professionnel ?

Il apparaît que les différentes alternatives proposées pour répondre aux besoins des personnes qui sont en recherche d'emploi ou qui souhaitent simplement se réorienter, ne sont pas toujours suffisantes, ou ne sont tout simplement pas assez personnalisées. C'est le premier point que relève M. Boujol, l'aspect " individualisation de la démarche " qui consiste à être au plus près des besoins de la personne. D'autre part, les coûts souvent élevés de certains bilans de carrière ou autres analyses entrent également en jeu.

Il se trouve que moi j'estime qu'un bilan de carrière, la personne peut le faire elle-même en toute autonomie. Elle n'a pas besoin que je sois là à côté pour remplir des questionnaires ou des choses comme ça. Ça ne veut pas dire que d'autres le font nécessairement comme ça mais disons que, pour ma part, quand je suis face à des gens qui sont dans des situations de bilan, finalement je passe relativement peu de temps avec eux, et puis il y a une partie qu'ils peuvent faire eux-mêmes et qui, au bout du compte, ne leur coûte rien puisque je leur donne des outils pour le faire et que ce n'est pas forcément très utile qu'on passe en revue le contenu de ce qu'ils auront trouvé, sauf si réellement c'est un élément déterminant pour leur choix ou pour leur orientation.

Enfin, M. Boujol avoue qu'en ce qui le concerne, les gens viennent souvent le voir parce que cela n'a pas marché ailleurs pour eux. Ayant entendu parler de lui, ils espèrent souvent une aide de sa part sans réellement savoir de quelle façon il pourrait agir. Au final, il leur propose une autre manière de répondre à leurs attentes, et une démarche réellement personnalisée, ce qu'ils n'ont pas toujours trouvé auprès d'autres services.

 

Choisir son coach

M. Boujol estime nécessaire de permettre aux gens de le rencontrer puis d'avoir un premier entretien avec lui afin de déterminer s'ils souhaitent ou non poursuivre avec lui. Selon lui, la logique voudrait que cette interaction soit déjà un début de coaching, afin de permettre à la personne de prendre conscience de la façon dont il travaille.

D'autre part, il remarque que bien souvent les gens s'adressent à lui car il a une certaine expertise dans le domaine qui les concerne. S'il ne s'agit pas d'un élément essentiel à l'accompagnement, en pratique, les gens s'orientent généralement vers des coaches dont ils estiment qu'outre leurs qualités relationnelles, ils ont également une expérience propre qui fait qu'a fortiori ils vont poser les bonnes questions.

Pourtant, il semble qu'il s'agisse au final d'une question de réceptivité entre le coach et la personne qu'il accompagne.

Moi j'ai l'impression que, in fine, une personne qui aurait quatre ou cinq noms, va faire son choix un peu comme ça au feeling comme on choisirait son médecin. Vous faites comment pour choisir un médecin plutôt qu'un autre ? Vous pouvez jauger des compétences professionnelles du médecin ? C'est très dur, sauf en avoir fait l'expérience.

 

 

                                                                                                            C. G.

 

Pour plus d'informations concernant les activités de Boujol Formation & Conseil, vous pouvez consulter le site http://www.boujol.com/ et le site http://www.srcoach.ch/fr/ en ce qui concerne la Société romande de Coaching.

 
 
                                                            
Jobtic logo