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La globalisation, une menace pour nos vacances d'été

Marché de l'emploi -
24 juillet 2013


La globalisation, une menace pour nos vacances d'été
Les vacances d'été ont encore une dimension symbolique forte dans notre imaginaire collectif. Repos, dépaysement, nature, plage, soleil, nudité, etc. Des images qui renvoient d'ailleurs parfois à une vision idéalisée des années 1960: fleurs dans les cheveux, bus VW, camping sauvage, road trip, etc. Mais face à la globalisation et à des impératifs économiques de compétitivité de plus en plus élevés, pourra-t-on encore longtemps profiter de longues vacances d'été?
Des différences culturelles importantes

Les vacances d'été sont éminemment culturelles et le nombre de jours de congés payés varie d'un pays à l'autre. Aux Etats-Unis, par exemple, le "cancre" en la matière, les congés payés ne sont pas réglementés. On évalue généralement à un quart de salariés qui n'en bénéficie pas, ce qui ne veut pas dire que ces derniers ne prennent pas de vacances. Dans les grandes entreprises américaines, en revanche, les salariés ont en moyenne deux semaines de vacances payées par an après plusieurs années d'activité.
D'après une étude du Center for Economic and Policy Research (CEPR) publiée en mai 2013, le nombre de jours de congés payés légaux dans les Etats européens s'élève à environ une vingtaine de jours par an.* Le chiffre peut monter jusqu'à 25 pour l'Allemagne, la Suède ou la Finlande, et même jusqu'à 30 pour la France. En Suisse, il s'élève à 20 jours par an, alors qu'il descend à 10 pour le Canada et le Japon, et chute, comme nous l'avons vu, à 0 pour les Etats-Unis.
Les effets de la globalisation

"Les vacances d'été, c'est quelque chose de très Français", relève avec une pointe d'humour Tanja Wranik, docteure en psychologie du travail et porte-parole de l'Association des psychologues du travail et des organisations (APSYTRA). Avant de nuancer quelque peu en évoquant le cas allemand: "La fermeture annuelle des petites et moyennes entreprises (PME) en Allemagne étaient un phénomène très répandu durant les années 1980 et 1990. Les patrons en profitaient alors pour effectuer des travaux de maintenance ou de rénovation dans leur entreprise. Aujourd'hui, cependant, de moins en moins de patrons peuvent se payer le luxe de fermer ou de ralentir leur activité durant cette période. La globalisation ne le permet plus."
Le cas allemand n'est pas unique. En Suisse aussi, la fermeture annuelle durant l'été des PME était en vigueur. "Si la Suisse semblait être encore épargnée jusqu'ici, depuis cinq ou six ans, constate Tanja Wranik, le phénomène est cependant aussi visible chez nous. Les entreprises ne peuvent plus se payer le luxe d'une fermeture annuelle, ce qui a d'ailleurs des conséquences sur leur productivité, car elles ne trouvent plus le temps d'effectuer des travaux de maintenance."
Des effets variables selon les secteurs d'activité

"La globalisation peut avoir en effet une influence sur les secteurs d'activité tournés vers l'exportation, concède Bernhard Salzmann, responsable de la communication à l'Union suisse des arts et métiers (USAM). Mais elle n'a que peu d'impact sur les secteurs d'activité nationaux." Et d'ajouter: "Tout dépend, en fait, de la branche."
Selon Alessandro Pelizzari, secrétaire régional d'Unia Genève, la gestion des vacances est avant tout le reflet d'un rapport de force entre les travailleurs et le patronat. "Dans le secteur de la construction genevois, note-il, où la syndicalisation des ouvriers est forte, les ouvriers ont trois semaines de vacances en été. Les vacances d'été sont considérées comme un droit pour de nombreux Espagnols et Portugais qui rentrent au pays." "Lors des négociations avec le patronat, ajoute-t-il, les ouvriers avaient d'ailleurs fortement réagi lorsque les associations patronales avaient tenté de le remettre en question."
Des standards économiques toujours plus élevés

Si la globalisation n'a pas un impact direct sur tous les secteurs d'activité, elle a apporté indéniablement des standards économiques toujours plus élevés, notamment en termes de compétitivité. "Une entreprise doit tourner aujourd'hui toute l'année, explique Tanja Wranik, et même en été. Le marché l'exige et les entreprises ont dû s'adapter. Durant la pause estivale, on maintient désormais un nombre suffisant de travailleurs pour éviter tout ralentissement de la production."
Un constat que partage en partie Alessandro Pelizzari: "Dans des secteurs d'activité où les syndicats sont peu implantés, les PME actives dans l'artisanat ou le secteur tertiaire, on a pris l'habitude de travailler à flux tendu, même durant la pause estivale."
DM
* L'étude a été réalisée dans 21 pays. Il s'agit de la France, du Royaume-Uni, de la Norvège, du Danemark, de la Finlande, de la Suède, de l'Allemagne, de l'Autriche, du Portugal, de l'Espagne, de l'Italie, de la Belgique, de la Nouvelle-Zélande, de l'Irlande, de l'Australie, de la Grèce, de la Hollande, de la Suisse, du Canada, du Japon et des Etats-Unis.
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